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LIVRE II - DES BIENS ET DES DIFFÉRENTS MODIFICATIONS DE LA PROPRIÉTÉ

 

TITRE I - DES CHOSES OU DES BIENS

 

CHAPITRE I - DE LA DISTINCTION DES CHOSES OU DES BIENS

Art. 1. Le mot bien se dit en général de tout ce qui peut composer les richesses et la fortune des citoyens; ce terme est également relatif au mot chose qui est le second objet du droit dont les règles doivent s'appliquer aux personnes, aux choses et aux actions.

Art. 2. Les choses sont ou communes ou publiques; ou elles appartiennent à des corps, ou elles sont dans le domaine de chaque particulier.

Art. 3. Les choses communes sont celles dont la propriété n'appartient à personne, et dont tous les hommes peuvent se servir librement, conformément à l'usage pour lequel la nature les a destinées; telles sont l'air, l'eau courante, la mer et ses rivages.

Art. 4. On entend par rivage de la mer, l'espace de terre sur lequel s'étendent les flots de la mer dans la plus grande élévation que ses eaux ont en tems d'hiver.

Art. 5. Il résulte de l'usage public des rivages de la mer, qu'il est permis à chacun, d'y bâtir une cabane pour s'y retirer, comme aussi d'y aborder, soit pour y pêcher, soit pour s'y retirer à l'abri de la tempête; d'y attacher ses vaisseaux, et d'y faire sécher ses filets et autres usages semblables, pourvu qu'on ne cause aucun dommage aux édifices ou monumens que les riverains y ont fait construire.

Art. 6. Les choses publiques sont celles dont la propriété appartient à un peuple et dont l'usage est permis à tous les membres de la nation. De ce genre sont les rivières navigables, les ports, rades et hâvres, les grands chemins et le lit des rivières aussi long-tems qu'il est couvert par les eaux.
De là il suit qu'il est permis à chacun de pêcher librement dans les rivières, ports, rades et hâvres.

Art. 7. On met aussi au nombre des choses publiques, celles qui sont à l'usage commun des habitans d'une ville, ou d'un autre lieu et où les particuliers ne peuvent avoir aucun droit de propriété, comme sont les murs, les fossés, les portes, les rues et les places publiques d'une ville.

Art. 8. L'usage des rivages des fleuves ou rivières navigables, est public; en conséquence chacun peut librement y faire aborder ses vaisseaux, en attacher les cordages aux arbres qui y sont plantés, y décharger ses navires, y déposer ses marchandises, y faire sécher ses filets et autres usages semblables.
Cependant la propriété des rivages des rivières appartient à ceux qui ont des terrés joignantes.

Art. 9. Les choses qui appartiennent à des corps ou corporations, sont d'un usage commun à tous ceux qui composent ces corps ou corporations respectivement; telles son les communes des villes, les églises des différentes congrégations religieuses et autres semblables.
Les personnes étrangères peuvent même avoir quelquefois l'usage des biens qui appartiennent à ces corps ou corporations, comme dans le cas des communes des villes, pourvu que les membres qui composent ces corps ou corporations ne s'y opposent pas.

Art. 10. Les choses qui sont dans le domaine de chaque individu, forment les biens et les richesses particulières.

Art. 11. Les choses se divisent en second lieu en corporelles et en incorporelles.
Les corporelles sont celles qui tombent sous les sens, que nous pouvons toucher et prendre, qui ont un corps soit animé, soit inanimé; de ce genre sont, les fruits, les grains, l'or, l'argent, les habits, les meubles, les terres, prés, bois et maisons.
Les incorporelles sont toutes celles qui ne peuvent tomber sous les sens, et que nous ne concevons que par l'entendement, telles que les droits d'hérédité, de servitude et les obligations.

Art. 12. Enfin une troisième division des choses ou des biens, est en meubles et en immeubles.

 

CHAPITRE II - DES IMMEUBLES

Art. 13. Les immeubles ou choses immobilières, sont en général ceux qu'on ne peut transporter d'un lieu à un autre, ou qui ne peuvent se mouvoir.
Mais cette définition ne s'applique rigoureusement qu'aux biens qui sont immeubles par leur nature et non à ceux qui ne le sont que par la disposition de la loi.

Art. 14. Il y a des biens immeubles par leur nature, d'autres par leur destination, d'autres encore par l'objet auquel ils s'appliquent.

Art. 15. Sont immeubles par leur nature, les fonds de terre et les bâtimens.

Art. 16. Les moulins à vent et à eau fixés sur piliers et faisant partie du bâtiment, sont aussi immeubles par leur nature.

Art. 17. Les récoltes pendantes par les racines et les fruits des arbres non encore recueillis, sont pareillement immeubles.
Dès que les grains sont coupés et les fruits détachés quoique non enlevés, ils sont meubles.
Si une partie seulement de la récolte est coupée, cette partie seule est meuble.

Art. 18. Les tuyaux servant à la conduite des eaux dans une maison ou autre héritage, sont immeubles et font partie du fonds auquel ils sont attachés.

Art. 19. Les esclaves sont considérés dans ce territoire, comme immeubles par l'opération de la loi, en raison de leur valeur et de leur importance pour la culture des terres et en conséquence, ils sont sujets à être hypothéqués.                   

Art. 20. Les objets que les propriétaires d'un fonds y ont placés pour le service et l'exploitation de ce fonds, sont immeubles par destination.
Aussi sont immeubles par destination, quand ils ont été placés par le propriétaier pour le service et l'exploitation du fonds:
Les animaux attachés à la culture;
Les ustensiles aratoires;
Les semences, plants, pailles et engrais;
Les pigeons des colombiers;
Les ruches à miel;
Les moulins, chaudières, alambics,  cuves, tonnes et autres machines servant à l'exploitation;
Les ustensiles nécessaires à l'exploitation des moulins à coton, à scie, guildives, raffineries et autres manufactures;
Sont aussi immeubles par destination, tous les effets mobiliers que le propriétaire a attaché au fonds ou au bâtiment, à perpétuelle demeure.

Art. 21. Le propriétaire est censé avoir attaché à son fonds ou bâtiment, des effets mobiliers, à perpétuelle demeure:
Lorsqu'ils y sont scellés en plâtre ou à chaux et ciment;
Ou lorsqu'ils ne peuvent être détachés, sans être fracturés et détériorés, ou sans briser et détériorer la partie du bâtiment ou du fonds à laquelle ils sont attachés;
Tels peuvent être les lambris, boiseries, tableaux, peintures, glaces et trumeaux.
A l'égard des statues placées par le propriétaire dans des niches pratiquées exprès dans les bâtimens, elles sont censées par cela seul à perpetuelle demeure.

Art. 22. Sont immeubles par l'objet auquel ils s'appliquent:
L'usufruit des choses immobilières;
Les servitudes ou services fonciers;
Les actions qui tendent à revendiquer un immeuble.

 

CHAPITRE III - DES MEUBLES

Art. 23. Les meubles sont meubles par leur nature ou par la détermination de la loi.

Art. 24. Sont meubles par leur nature, les corps qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre, soit qu'ils se meuvent par eux-mêmes, comme les animaux, soit qu'ils ne puissent changer de place que par l'effet d'une force étrangère, comme les choses inanimées.

Art. 25. Sont meubles par la détermination de la loi, les obligations et actions qui ont pour objet des sommes exigibles ou des effets mobiliers des actions ou intérêts dans les banques ou compagnies de commerce ou d'industrie ou autre spéculation, encore que des immeubles dépendans de ces entreprises appartiennent aux compagnies; ces actions ou intérêts sont réputés meubles, à l'égard de chaque associé seulement, tant que dure la société.
Sont aussi réputées meubles par la détermination de la loi, les rentes perpétuelles et viagères.

Art. 26. Toute rente établie à perpétuité pour le prix de la vente d'un immeuble ou comme condition de la cession, à titre onéreux ou gratuit, d'un fonds immobilier, est essentiellement rachetable.
Il est néanmoins permis au créancier de régler les clauses et conditions du rachat.
Il est aussi permis de stipuler que la rente ne pourra lui être remboursée qu'après un certain terme, lequel ne peut jamais excéder trente ans; toute stipulation contraire est nulle.

Art. 27. Les bateaux, bacs, navires, moulins sur bateaux, généralement toutes usines non fixées par des piliers, et ne faisant point partie de la maison, sont meubles.

Art. 28. Les matériaux provenant de la démolition d'un édifice, ceux assemblés pour en construire un nouveau, sont meubles, jusqu'à ce qu'ils soient employés par l'ouvrier dans une construction.

Art. 29. Les mots meubles meublans employés dans les dispositions de la loi ou de l'homme, ne comprennent que les meubles destinés à l'usage et à l'ornement des appartemens, comme tapisseries, lits, sièges, glaces, pendules, tables, porcelaines et autres objets de cette nature.
Les tableaux et les statues qui font partie du meuble d'un appartement y sont aussi compris, mais non les bibliothéques qui peuvent s'y trouver ni l'argenterie.

Art. 30. L'expression biens meubles, celle de mobiliers ou d'effets mobiliers comprennent généralement tout ce qui est censé meuble d'après les règles ci-dessus établies.

Art. 31. La vente ou le don d'une maison meublée ne comprend que les meubles meublans.

 

CHAPITRE IV - DES BIENS DANS LEUR RAPPORT AVEC CEUX QUI LES POSSÈDENT

Art. 32. Les particuliers ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent, sous les modifications établies par la loi.
Mais ceux de la nation des corps ou corporations sont administrés d'après des lois et des règlemens qui leur sont propres; c'est aussi suivant les formes prescrites par ces lois et ces règlemens, que la nation et les corporations peuvent vendre leurs biens, ou autrement en disposer.

Art. 33. Le domaine national proprement dit, s'entend de toutes les propriétés foncières et de tous les droits qui appartiennent à la nation, soit qu'elle en ait la jouissance actuelle, soit qu'elle ait seulement le droit d'y rentrer.

Art. 34. On peut avoir sur les biens différentes espèces de droits;
Les uns en ont la propriété pleine et entière, d'autres une simple jouissance, d'autres enfin n'ont que des services fonciers à exiger.




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