CHAPITRE III - DES ENGAGEMENS DES ASSOCIÉS ENTRE EUX ET VIS-À-VIS DES TIERS
SECTION I - DES ENGAGEMENS DES ASSOCIÉS ENTRE EUX
Art. 19. La société contractée, sans que le tems où elle doit commencer soit exprimé, commence dès l'instant du contrat.
Art. 20. S'il n'y a pas eu de convention sur la durée de la société, elle est censée avoir été contractée pour tout le tems de la vie des associés, sous la modification portée en l'article 54 ci-après; ou s'il s'agit d'une affaire, dont la durée soit limitée, pour tout le tems que doit durer cette affaire.
Art. 21. On peut faire dépendre d'une condition le contrat de société.
Art. 22. Chaque associé est débiteur envers la société de tout ce qu'il a promis d'y apporter.
Lorsque cet apport consiste en un corps certain, et que la société en est évincée, l'associé en est garant envers la société de la même manière qu'un vendeur l'est envers son acheteur.
Art. 23. L'associé, qui a promis d'apporter à la société un corps certain, est tenu, en cas d'éviction, de la même garantie envers la société, qu'un vendeur envers son acheteur.
Art. 24. L'associé, qui a promis de mettre une somme dans la société, en doit les intérêts du jour où il s'est obligé de la fournir.
Il doit également, les intérêts des sommes qu'il a prises dans la caisse sociale, du jour qu'il les en a tirées.
Art. 25. Les associés, qui se sont réciproquement obligés d'apporter à la société leur industrie, lui doivent compte de tous les gains que chacun d'eux a fait, par l'espèce d'industrie qui est l'objet de cette société.
Art. 26. Lorsque l'un des associés est, pour son compte particulier, créancier d'une personne sur qui la société a aussi une créance de même nature et également exigible, l'associé doit imputer ce qu'il reçoit de ce débiteur, sur la créance de la société et sur la sienne, dans la proportion des deux créances, quand même, par sa quittance, il aurait fait l'imputation en entier sur sa créance particulière.
Art. 27. Lorsqu'un des associés a reçu sa part entière de la créance commune, si le débiteur est depuis devenu insolvable, l'associé qui a reçu sa part entière, est tenu de rapporter à la masse commune ce qu'il a reçu, encore qu'il eut donné la quittance pour sa part.
Art. 28. Chaque associé est débiteur, envers la société, des dommages qu'il lui a causés par sa faute, sans pouvoir compenser, avec ces dommages, les profits que son industrie lui aurait procurés dans d'autres affaires.
Art. 29. Si les choses, dont la jouissance seulement a été mise dans la société, sont des corps certains et déterminés, qui ne se consomment pas par l'usage, elles sont aux risques de l'associé.
Si ces choses se consomment, si elles se détériorent en les gardant, si elles ont été destinées à être vendues, si elles ont été mises dans la société sur une estimation portée par un inventaire, elles sont aux risques de la société; l'associé, dans ces derniers cas, n'est créancier que de la somme à laquelle monte l'estimation.
Art. 30. Un associé peut être créancier de la société, non-seulement des sommes qu'il a déboursées, mais encore des obligations qu'il a contractées de bonne foi pour les affaires de la société, et des risques inséparables de sa gestion.
Art. 31. Lorsque l'acte de société ne détermine point la part de chaque associé dans les bénéfices ou pertes, la part de chacun est en proportion de sa mise dans le fonds de la société.
Art. 32. Si les associés sont convenus de s'en rapporter à l'un d'eux, ou à un tiers, pour le règlement des parts, ce règlement ne peut être attaqué que par une preuve certaine, qu'il est contraire à l'équité.
Art. 33. La convention qui donne à l'un des associés la totalité des bénéfices, est nulle.
Il en est de même de la stipulation qui affranchirait, de toute contribution aux pertes, les sommes ou effets mis dans le fonds de la société, par un ou plusieurs des associés.
Art. 34. L'associé chargé de l'administration, par le contrat de société, peut faire, contre le gré et malgré l'opposition des autres associés, tous les actes qui dépendent de son administration, pourvu qui ce soit sans fraude, et pour le bien de la société.
Ce pouvoir ne peut être révoqué, tant que la société dure, sans cause légitime.
Si le pouvoir d'administrer est postérieur au contrat de société, c'est un simple mandat, susceptible de révocation.
Art. 35. Lorsque plusieurs associés sont chargés d'administrer, sans que leurs fonctions soient déterminées, ou sans qu'il ait été exprimé, que l'un ne pourrait agir sans l'autre, ils peuvent faire séparément tous les actes de cette administration.
Art. 36. S'il a été stipulé, que l'un des administrateurs ne pourra rien faire sans l'autre, un seul ne peut agir, lors même que l'autre est, par maladie ou autrement, dans l'impossibilité de concourir aux actes administratifs, jusqu'à ce qu'il y ait, entre les associés, une nouvelle convention.
Art. 37. Lorsque dans l'acte de société il n'y a point de convention sur l'administration, on suit les règles suivantes:
1º. Les associés sont censés s'être donnés, réciproquement, le pouvoir d'administrer l'un pour l'autre; ce que chacun fait est valable, même pour la part de ses associés, sans qu'il ait pris leur consentement, sauf le droit qu'ont ces derniers, ou l'un d'eux, de s'opposer à l'opération avant qu'elle soit conclue;
2º. Chaque associé peut se servir des choses appartenant à la société, pourvu qu'il les emploie aux usages auxquelles elles sont destinées, et qu'il ne s'en serve de manière à empêcher ses associés d'en user selon leur droit, et contre l'intérêt de la société;
3º. Chaque associé a le droit d'obliger ses associés à faire avec lui les dépenses qui sont nécessaires pour la conservation des choses de la société;
4º. Un associé ne peut faire aucun changement, ni innovation sur les immeubles dépendans de la société, sans le consentement de ses associés, quand même cette innovation serait avantageuse à la société;
5º. Dans une société de commerce en nom collectif, les choses acquises durant la société, par des marchés signés un tel et compagnie, appartiennent à la société, soit que l'acquisition ait été faite des deniers de la société ou de ceux propres à l'un des associés; ce dernier est seulement alors créancier de la société, en raison de son avance.
6º. Dans les sociétés autres que de commerce, un associé ne peut dans sa seule qualité d'associé, et s'il n'a pas l'administration, aliéner ni engager les choses qui en dépendent.
Art. 38. Chaque associé peut, sans le consentement de ses associés, s'associé une tierce personne, à la part qu'il a dans la société; il ne peut pas sans ce consentement, l'associer à la société, lors même qu'il en aurait l'administration.
Il répond des dommages causés par cette tierce personne à la société, de la même manière qu'il répond de ceux quil a causés lui-même suivant l'article 28 ci-dessus.
Art. 39. Dans les sociétés de commerce en nom collectif, les choses acquises par un associé pour son compte particulier, n'y tombent pas, quoiqu'elles ayent été acquises pendant la société et des deniers communs; à moins qu'il ne s'agisse d'un marché qui soit dans la même espèce de commerce que celui de la société, et qu'il n'eut été de l'intérêt de la société de faire ce marché, auquel cas il peut être contraint d'y rapporter les choses ainsi acquises.
Art. 40. Tout contrat de société doit contenir la clause de se soumettre à des arbitres, sur toutes les contestations qui peuvent survenir concernant la société, et si cette clause n'y a pas été exprimée, elle est toujours sous entendue.
SECTION II - DES ENGAGEMENS DES ASSOCIÉS VIS-À-VIS DES TIERS
Art. 41. Dans les sociétés de commerce en nom collectif, on suit, quant aux dettes, les règles suivantes:
1º. Chacun des associés est tenu solidairement des dettes de la société;
2º. Les dettes de société, sont celles contractées par celui qui avait le pouvoir d'obliger tous les associés, et au nom de la société;
3º. Ce pouvoir est présumé, lorsque celui qui a contracté était dans l'usage de contracter au nom de la société, au vu et su des associés, ou lorsque, sans être dans cet usage, il a signé pour la compagnie; le tout, encore qu'il eut été formellement exclu de l'administration, par une clause du contrat de société, pourvu néanmoins dans ce dernier cas, que l'acte de société n'eut pas été rendu public avant l'engagement contracté;
4º. La dette est encore présumée contractée au nom de la société, lorsque l'associé ajoute à sa signature, qu'il signe pour la compagnie et non autrement; la société en est tenue, lors même que la dette n'a pas tourné à son profit, à moins que, par le genre de l'obligation, il ne paraisse qu'elle ne concernait pas les affaires de la société.
Art. 42. Dans les sociétés en commandite, et dans celles anonymes, les associés en commandite, et les associés anonymes, ne sont point tenus des dettes de la société envers les créanciers avec qui l'associé principal ou connu a contracté. Ils ne sont tenus qu'envers l'associé principal et connu qui les a contractées, savoir: l'associé anonyme indifinitivement, pour la part qu'il a dans la société, et l'associé en commandite, jusqu'à concurrence seulement des fonds qu'il a mis dans la société.
Art. 43. Dans les sociétés particulières, autres que de commerce, les associés ne sont pas tenus solidairement des dettes sociales, et nul ne peut obliger son associé, s'il ne lui en a conféré le pouvoir.
Art. 44. Dans ces mêmes sociétés, chacun des associés est tenu envers le créancier, pour sa part virile, encore que sa part, dans la société, fut moindre, si les parties, qui ont contracté la dette, ne s'en sont pas expliquées.
Art. 45. Lorsque la dette d'une société, autre que de commerce, n'a été contractée que par l'un des associés, il n'y a que celui qui l'a contractée qui en soit tenu envers le créancier, encore qu'il eut été exprimé, que c'était pour le compte de la société, tant en son nom qu'au nom de son associé, à moins qu'il ne fut justifié, ou que son associé lui a donné pouvoir, ou que la dette a tourné au profit de la société.