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TITRE XIX - DES PRIVILÉGES ET HYPOTHÈQUES

 

CHAPITRE I - DE LA NATURE DE L'HYPOTHÈQUE, ET DE SES DIVISIONS

Art. 1. L'hypothèque est un contrat, par lequel une personne affecte la totalité de ses biens, ou seulement quelques-uns d'entre eux en faveur d'un autre, pour sûreté de quelque engagement, mais sans se dépouiller de leur possession.           

Art. 2. L'hypothèque est une espèce de gage, la chose hypothéquée étant obligée au payement de la dette ou de l'engagement:
Elle a de commun avec le gage, 1°. Que l'un et l'autre sont accordés aux créanciers pour sûreté de leurs créances: et 2°. Que l'un et l'autre affectent la chose qui y est sujette, et qu'on ne peut engager la même chose à un second créancier, au préjudice du premier.
Elle diffère du gage 1°. En ce que le terme d'hypothèque ne s'applique qu'aux immeubles et aux esclaves, et celui du gage aux meubles; et 2°. En ce que, dans le gage, les meubles et effets qui y sont sujets, doivent être mis entre les mains et en la puissance du créancier, tandis que l'hypothèque ne fait qu'affecter les immeubles et esclaves aux droits du créancier, sans qu'il soit besoin de l'en mettre en possession.           

Art. 3. L'hypothèque est un droit réel sur les biens qu'elle affecte: elle est de sa nature indivisible; elle subsiste en entier sur tous et chacun des biens affectés et sur chaque portion d'iceux; elle suit le bien hypothéqué dans quelque mains qu'il passe.           

Art. 4. Il y a trois sortes d'hypothèques:
On nomme hypothèque conventionnelle, celle qui résulte de la convention des parties;
Hypothèque judiciaire, celle que la loi attribue aux jugemens;           
Et hypothèque légale ou tacite, celle qui résulte de la loi seulement.           

Art. 5. L'hypothèque conventionnelle ne peut être consentie, que par acte authentique, dans la forme ordinaire des contrats, ou par acte sous signature privée.
L'hypothèque stipulée verbalement, n'est pas valable, et la preuve testimoniale n'en est point admise, quelque soit le montant de la dette ou de l'obligation pour laquelle elle a été consentie.          

Art. 6. Il n'y a point d'hypothèque conventionnelle, que celle qui est stipulée expressément dans l'acte fait entre les parties; elle n'est jamais sous-entendue, et ne s'induit point de la nature de l'acte.           

Art. 7. Ceux qui n'ont, sur les biens susceptibles d'hypothèque, qu'un droit suspendu par une condition, ou résoluble dans certains cas, ou sujet à rescision, ne peuvent consentir qu'une hypothèque soumise aux mêmes conditions, ou à la même rescision. 

Art. 8. L'hypothèque judiciaire, est celle qui procède d'un jugemene quelconque; elle est de même nature que l'hypothèque conventionnelle laisse le débiteur en possession de tous ses biens, mais elle les affecte de la même manière que l'hypothèque conventionnelle au payement des condamnations prononcées contre le débiteur par le jugement.           

Art. 9. L'hypothèque judiciaire a lieu du jour où les jugemens, soit contradictoires, soit par défaut, définitifs ou susceptibles d'appel, sont rendus, et ce, en faveur de celui qui les a obtenus; s'il y a appel d'aucun jugement non définitif, et qu'il soit confirmé, l'hypothèque remonte au jour du jugement dont est appel.           

Art. 10. Lorsque, sur l'appel, le jugement n'a été infirmé que dans de certaines dispositions, l'hypothèque de ce jugement subsiste pour toutes les dispositions qui n'ont point été changées ou infirmées.           

Art. 11. Les décisions arbitrales n'emportent hypothèque, que du jour où elles sont revêtues de l'ordonnance judiciaire d'exécution.           

Art. 12. L'hypothèque ne peut pareillement résulter des jugemens rendus dans les autres états ou territoires de l'union, que du jour où l'exécution en a été ordonnée par l'un des juges de ce territoire.           

Art. 13. Les jugemens obtenus contre un défunt, n'emportent hypothèque sur les biens personnels de l'héritier, que du jour du jugement qui les a déclarés exécutoires contre ledit héritier.           

Art. 14. L'hypothèque conventionnelle et judiciaire ne peuvent préjudicier au tiers, que de la date de leur inscription au bureau conservatoire des hypothèques, de la manière et dans la forme ci-après prescrites.           

Art. 15. L'hypothèque légale, est celle qui procède de la loi, sans aucune convention expresse des parties, mais qui est fondée néanmoins sur un consentement tacite, que la loi présume donné par celui sur les biens duquel elle accorde cette hypothèque; c'est pourquoi elle est aussi appelée en droit, hypothèque tacite.
Telle est l'hypothèque que le mineur a sur les biens de son tuteur, du jour de la nomination de celui-ci; telle est celle que la loi donne à la femme, pour sa dot, sur les biens de son mari. 

Art. 16. Il n'y a d'hypothèque légale, que dans les cas déterminés par la loi. 

Art. 17. La femme a une hypothèque légale sur les biens de son mari, savoir:
1º. Pour la restitution de sa dot, et pour le remploi des biens dotaux vendus par le mari, et qu'elle a apportés en mariage, et ce, à compter du jour de la célébration du mariage;
2º. Pour la restitution ou le remploi des biens dotaux qui lui sont advenus pendant le mariage, soit par succession ou donation, du jour que la succession s'est ouverte, ou que la donation a eu son effet;
3º. Pour l'indemnité des dettes auxquelles elle s'est obligée, conjointement avec lui, et pour le remploi de ses propres aliénés, du jour de l'obligation ou de la vente. 

Art. 18. Les hypothèques que la loi établit en faveur de la femme ont lieu, non-seulement pour la femme personnellement, mais encore au profit de ses héritiers ou ayans cause. 

Art. 19. Les mineurs, les interdits et les absens, ont hypothèque sur les biens de leurs tuteurs et curateurs, pour sûreté de leur administration, du jour de la nomination desdits tuteurs et curateurs, jusqu'à celui de l'apurement et de la clôture de leur compte définitif.
Et les tuteurs et curateurs desdites personnes, ont une semblable hypothèque sur leurs biens, pour sûreté des avances qu'ils peuvent leur avoir faites. 

Art. 20. Il y a hypothèque légale sur les biens de ceux qui, sans avoir été tuteurs ou curateurs, se sont immiscés dans l'administration des biens des mineurs, interdits, ou absens, à compter du jour où ils ont fait le premier acte de cette administration.           

Art. 21. Les enfans des précédens mariages, dont la mère s'est remariée sans convoquer une assemblée de famille pour faire prononcer si la tutelle desdits enfans lui sera conservée ou non, ont une hypothèque légale sur les biens du nouveau mari, pour les faites de la tutelle, ainsi indûment conservée par leur mère, à compter du jour de la célébration du nouveau mariage.           

Art. 22. Il y a hypothèque légale, à compter du jour de la clôture de l'inventaire, contre le survivant des époux, ou les héritiers qui ont été chargés, par l'inventaire, des biens de la communauté ou de la succession. 

Art. 23. Les co-héritiers ont une hypothèque légale ou tacite sur les biens qui ont été l'objet du partage, du jour de ce partage, pour la garantie de leurs portions respectives, et pour la soulte ou retour des lots. 

Art. 24. Les légataires universels ou particuliers, ont une hypothèque légale sur les biens de la succession de celui qui leur a fait le legs, à compter du jour de son décès, pour sûreté de la délivrance desdits legs de la part des héritiers, ou obligés aux legs. 

Art. 25. Le territoire, les différentes paroisses, les communes et autres corporations, les compagnies de commerce et de navigation, et les établissemens publics, ont une hypothèque légale sur les biens de leurs receveurs et comptables, du jour où ils sont entrés en fonctions. 

Art. 26. Il y a hypothèque légale sur tous les biens des séquestres et gardiens établis par autorité de justice, à compter du jour de leur nomination.
Le tout, sans préjudice des autres hypothèques légales, qui peuvent n'être pas mentionnées ici, et être établies dans d'autres parties du présent code. 

Art. 27. L'hypothèque légale n'est point sujette à inscription. 

Art. 28. Les hypothèques, soit légales, soit judiciaires, soit conventionnelles, s'étendent sur tous les biens présens ou futurs du débiteur, qui sont susceptibles d'hypothèque, à moins, qu'à l'égard des biens futurs, il n'y ait stipulation contraire. 

Art. 29. L'hypothèque, sous un autre point de vue, peut se diviser en hypothèque simple, et hypothèque privilégiée.
L'hypothèque simple ne donne au créancier d'autre droit, d'autre préférence sur les biens de son débiteur, que ceux que lui procure la date de son inscription ou de sa créance; suivant cette règle, le premier en date est payé le premier;
L'hypothèque privilégiée, autrement appelée simplement privilége, est celle qui dérive d'une cause privilégiée, et qui donne la préférence sur les créanciers qui n'ont qu'une simple hypothèque, quand bien même ils seraient antérieurs en date.
Telle est l'hypothèque du vendeur qui est préféré à tous autres, pour son payement sur le fonds qu'il a vendu. 

Art. 30. L'hypothèque se divise enfin, en hypothèque générale, et hypothèque spéciale.
L'hypothèque générale, est celle qui comprend tous les biens présens et avenir du débiteur.
La spéciale, au contraire, est, ou limitée à de certains biens, comme aux biens présens, ou restreinte à certains biens nommément. 

Art. 31. L'hypothèque spéciale oblige le créancier à discuter le bien qui lui est ainsi hypothéqué, avant de pouvoir s'adresser aux autres, mais on est dispensé de cette obligation, s'il a été stipulé, que l'hypothèque générale ne dérogera pas à la spéciale, ni la spéciale à la générale.




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